« La Fabrique à idées » produit aussi de l’espoir…

A quelles conditions ne pas le décevoir ?

Ne boudons pas notre plaisir : le rendez-vous donné aux Vitriot-e-s jeudi 7 novembre au nom -et dans le but- de « La Fabrique à idées pour inventer Vitry en mieux » a été une réussite. Succès de participation avec une grosse centaine de présent-e-s. Succès participatif surtout ! Et sans doute est-ce cela qu’il faut principalement retenir.

Participer c’est exister ! Chacune et chacun a pu exister dans cet acte d’ouverture de La Fabrique. Découvrir l’Autre, être de ces femmes et ces hommes attablés par groupes d’une vingtaine ou plus, parlant de leur ville, de leurs espoirs, de leurs colères, de leurs idées… se côtoyer, s’entendre, se reconnaître, c’était déjà dire les liens et les lieux qui manquent à Vitry pour exister ensemble. Dans ce moment à la fois si simple et si précieux, j’ai retrouvé de l’estime à être de cette ville. Les mots peuvent varier pour le dire, mais j’ai le sentiment que chacun-e à sa façon et des degrés divers, a pu ressentir quelque chose de similaire.

C’est d’autant plus décisif que Vitry est une mosaïque, un caléidoscope qui décline mille façons de penser et interpréter le monde qui nous entoure. Je ne fais pas référence à la tarte à la crème de la « diversité », devenue si politiquement correcte, mais à la capacité à imaginer un destin commun dans la reconnaissance et l’enrichissement mutuels de ce que sont les unes et les autres. Cela embrasse à la fois ce qui peut relever des convictions intimes, sur le sens de la vie, et les pratiques ou types d’organisations qui régissent l’engagement collectif. On touche, là aussi, à ce qui fait cruellement défaut dans la vie locale.

La Fabrique a constitué un premier point de rencontre de tout cela. Le fait est assez rare pour l’identifier comme une vraie innovation. Elle n’est guère relevée dans l’article du Parisien du 9 novembre, et sans doute échappera-t-elle à d’autres. Les plus mal intentionnés réduiront même La Fabrique à une « chose » habilement mise au service d’une ambition personnelle -celle, supposée, de Jacques Perreux… Il ne faut ni s’en décourager, ni s’y résigner. La popularité et la notoriété de Jacques en inquiètent certains. C’est leur problème ! A nous, elle apporte du réseau, des connaissances, des relais utiles au développement de La Fabrique et de la démarche qui l’accompagne. C’est à cette démarche qu’il faut continuer de travailler sans relâche.

De beaux défis sont devant nous : de la demande exprimée d’un bilan critique exhaustif et argumenté de l’action municipale -en partie esquissé dans le 1er journal de La Fabrique- au souhait de construire de façon rigoureuse des propositions sur l’ensemble des problématiques locales, en passant par l’exigence qu’à chacun de ces moments d’élaboration, la démarche participative soit bien au rendez-vous. L’accomplissement de ces objectifs ne doit pas être renvoyé à quelques experts ou professionnels qui « sauraient ». Ce serait lâcher le pouvoir de décider et d’agir que nous cherchons à nous réapproprier. Nous pratiquons notre ville au quotidien. Nous sommes les experts de notre cité, c’est à dire toutes et tous aptes à nous occuper des affaires de la cité, bref, à « faire de la politique ». Mais en la matière, nous ne nous y prenons pas tous de la même manière !

Certains sont « politiquement organisés » et des militants de 3 ou 4 partis différents étaient là jeudi 7 novembre. D’autres ont sciemment décidé de ne pas (ou ne plus) être dans un parti mais considèrent que leur engagement -quelle qu’en soit la forme- participe de ce qui se joue dans l’espace public et les rapports de forces, pour plus de justice, de libertés, de bien être, contre le libéralisme, l’austérité, toutes les formes d’oppression, d’aliénation, etc.

D’autres encore sont politiquement « nomades » ou bien indifférents à se classer eux-mêmes ou à pouvoir l’être par d’autres, dans le champ et selon les codes du « spectre politique classique ». Soit dit en passant, tout ceci est aussi la résultante de la crise de la politique…

Chacun-e a la responsabilité de traiter cette question pour ce qu’elle est : une apparente et indéniable difficulté pouvant devenir UN OBSTACLE insurmontable, ce qui ne pourrait que renforcer ladite crise (repli, abstention, dégoût et défiance généralisée) ou, UN ATOUT pouvant conférer à notre entreprise collective une force vraiment capable de changer la donne locale.

Alors comment faire jouer à plein l’atout et non la division ?

Il faut s’interdire de hiérarchiser nos engagements et façons d’être dans La Fabrique selon les appartenances revendiquées des unes et des autres et traiter toutes les façons de s’impliquer sur un pied d’égalité, avec un égal respect. C’est la garantie de faire de La Fabrique un bien commun, un outil d’appropriation individuelle et collective du pouvoir d’agir et de décider ensemble comment changer Vitry en mieux. Puisque que nos « codes » et modes d’engagement diffèrent, cela demande de s’écouter, de s’apprivoiser, d’être bienveillants les uns vis à vis des autres et parfois, sans doute, de laisser ses certitudes se faire un peu bousculer. Nul n’a à renoncer sur ce qu’il est. Tout le monde est tenu de prendre l’Autre en considération. Personne n’a la science infuse.

Les forces politiques de gauche qui souhaitent en être le peuvent, pleinement, avec leur apport singulier, mais en mesurant aussi que ce lieu d’élaboration commune, s’il peut se nourrir de leur apport, n’a pas vocation à valider -ni invalider- toutes leurs positions ou convictions sur toutes les grandes questions économiques ou sociétales, la politique nationale ou européenne. Il ne s’agit pas pour autant de faire dans le « localisme » étroit et politiquement insipide. Nos débats ont pour l’instant montré que l’essentiel peut faire consensus ; par exemple, quant au refus du dogme austéritaire ou à l’enjeu d’une métropole durable, inclusive, démocratique et solidaire, à propos des Roms ou du droit de vote des étrangers.

Hors celles qui considèrent définitivement « qu’à Vitry tout va bien » et soutiennent le renouvellement de l’exécutif municipal en l’état, on peut raisonnablement faire l’hypothèse que les forces politiques qui ont déjà fait ou feront bientôt le choix d’être partie prenante de La Fabrique, ne pourront qu’en être jugées méritantes. Enfin, moi j’dis ça, j’dis rien ! Libre à chacune de se déterminer. Mais cette question du rapport aux forces politiques et notre commune vigilance à ce sujet m’importent beaucoup, car je sais d’expérience qu’avec cette question nous sommes sur le fil entre le possible échec ou la probable réussite.

Nous avons entendu de premières propositions citoyennes et beaucoup de réflexions pertinentes sur ce qui pourrait changer à Vitry à l’ouverture de notre Fabrique. Et aussi ces phrases, aussi lourdes de sens que pleines de bon sens, à la table de discussion à laquelle je participais : « je suis venu ici pour me remotiver, retrouver une envie de m’impliquer et de voter » (Manuel) ; « Je voudrais que les dirigeants (locaux) soient aiguillonnés par une nouvelle force, par nous tous en fait » (Didier).

Ce sont aussi les espoirs qui m’animent. Si ce n’est à ça que sert La Fabrique, alors à quoi ?

Hugues.Latron

Hugues LATRON

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