L’aéropage et le collège du Port-à-l’Anglais

collegeZACseinegare[1]Depuis les années 1980 et la fermeture du collège Montesquieu, les habitants du Port à l’Anglais attendent la création d’un collège, éloignés qu’ils sont d’un tel établissement.

La construction en nombre de nouveaux logements dans le quartier entraîne l’extension des écoles maternelles et primaires mais du collège on ne fait que parler ! Puis on le promène de terrain en terrain pour plaire aux habitants, puis aux promoteurs, puis aux aménageurs.

Le terrain le plus propice serait sur Ivry mais le collège est que pour Vitry et on ne se cause pas, na !

Finalement le terrain est décidé sans concertation dans la ZAC d’Etat Seine Gare, au cœur de la zone industrielle déliquescente et polluée, face à des implantations de transporteurs destinées à subsister.

Enfin le 23 janvier 2015, dans une réunion obligatoire de concertation pour la ZAC initiée par l’EPAORSA apparaissent quelques images du futur collège, le projet ayant été retenu à la suite d’un concours conception/réalisation décidé pour gagner du temps et hâter la réalisation du collège !!!!!!!

Les travaux de construction doivent débuter en 2015 et le collège ouvrir en 2017.

Le 24 février 2015, pour suppléer à la carence institutionnelle, La Fabrique Vitry en mieux, organise une présentation, dans le quartier, à la fois du nouveau projet de ZAC, et du projet de collège dont les plans sont enfin dévoilés aux résidents présents.

A l’automne 2015, aucune nouvelle de démarrage des travaux et des bruits circulent quant à une difficulté liée à la pollution du terrain. Ceci sera confirmé le 13 février 2016 par un technicien lors d’une visite de terrain.

Les élus démasqués ne pourront plus cacher la merde au chat et devront bien reconnaître que les sondages, pratiqués seulement après le choix et l’acquisition du terrain, révèlent une importante pollution aux hydrocarbures concernant le terrain du collège et le terrain voisin promis à la réalisation d’un vaste hôtel d’entreprises (le « Démonstrateur »).

Personne ne veut financer la dépollution estimée à 8.000.000 € (il convient de retirer l’ensemble des terres polluées, de les adresser à des entreprises spécialisées pour assurer leur traitement adéquat et de les remplacer par des remblais de bonne qualité, le tout sur environ 5m de profondeur).

Par ailleurs le Département ne peut changer de terrain que en abandonnant ce projet et en concevant un nouveau. En plus du délai supplémentaire, compte tenu du marché de conception/réalisation, sa dénonciation coûterait entre 5.000.000 et 10.000.000 €.

En juin 2016 la situation est bloquée mais devant les mécontentements exprimés nos élus s’emploient à la recherche d’une solution. Le recours massif à une scolarisation dans des collèges privés n’est pas reconnu par nos élites municipales.

Les derniers jours de novembre une invitation à une réunion « Collège du Port à l’Anglais » le 1er décembre 2016 fleurit les boîtes aux lettres.

A 20h30 une assistance aussi nombreuse que ponctuelle emplit le réfectoire de l’école Montesquieu. Habitants et parents sont motivés.

L’aéropage déplacé est certainement le plus nombreux jamais réuni pour une telle réunion. Témoignage de leurs désaccords et de leurs faiblesses ?

Le Maire et son adjoint à l’aménagement, Président du T12, la 1ère V.P. du Conseil Départemental et le V.P. aux finances, le Directeur Général de l’EPAORSA et sa directrice de l’aménagement, la D.G.S du département, la directrice de l’aménagement de la ville, le député, la conseillère départementale du quartier, leurs troupes, les représentants de l’architecte, les représentants de l’entreprise, etc….

Discours du maire, puis de la 1ère VP, puis de l’adjoint aménageur montrant des plans, puis de l’architecte montrant les plans du collège (personne ne voit les petits dessins au tableau) connus de presque tous, puis de l’entreprise expliquant les qualités du béton de chanvre et la profondeur des fondations. Progressivement des brouhahas montent de l’assemblée jusqu’à un  « pétage de plomb » d’un parent sans doute mal initié aux vertus d’un simulacre de concertation.

Résumons les propos :

La ville achète le terrain du collège (à l’EPFIF) et le met à disposition du département (selon la VP), le cède au département (selon le maire).

Le département dépollue le terrain du collège dans le cadre d’un partenariat avec l’EPFIF qui dépollue le terrain mitoyen. Ceci est prévu au moyen d’un appel d’offres fin du premier trimestre 2017 et de 6 mois de travaux.

Le département construit le collège à partir de l’automne 2017, avec l’objectif d’une mise en service à la rentrée de l’année scolaire 2019/2020.

Le terrain mitoyen perd sa vocation économique (le programme destiné aux PME et PMI a fait l’objet d’un partenariat amont avec 6 promoteurs qui devait aboutir à des promesses de vente en 2015 et des mises en service en 2018). Il est remplacé par le programme d’équipements scolaires municipaux prévu initialement à l’angle NE de B. Albrecht et E. Cavell et des logements (ces 1ères réalisations qui se situaient plutôt en prolongement de la zone d’habitat se retrouvent ainsi au milieu des friches industrielles). Il est probable que la ville achète ce terrain assez rapidement, vu l’absence de promoteurs intéressés (sinon l’EPFIF n’engage pas de nouvelles acquisitions et la ZAC reste bloquée) et qu’elle paie ainsi une nouvelle contribution à la dépollution, partielle ou totale.

3 conséquences majeures :

L’accentuation de la transhumance vers l’enseignement privé (il est probable que 50% des CM2 de Montesquieu seront en 6ème dans des établissements privés à la prochaine rentrée, s’ajoutant aux inscriptions réalisées dès l’entrée en primaire.

La mise à la charge de la ville, dans une ZAC (une ZAC doit permettre de dégager les financements pour la réalisation des équipements nécessaires à ses habitants) d’Etat, de l’acquisition d’un terrain destiné à la construction du collège relevant de la stricte compétence départementale (juridiquement critiquable ?). Et peut-être une charge supplémentaire pour l’opération écoles + logements.

La remise en cause du parti d’aménagement qui a fait l’objet de la concertation pour la modification de la ZAC qui reste d’ailleurs en attente d’une enquête Loi sur l’eau, d’un programme d’équipements, d’un bilan financier, d’une DUP, etc…. 5 ans après sa création. Seul un élu obstiné s’acharne à sa « réalisation », ruinant sa commune en croyant qu’il peut utiliser l’appareil d’Etat.

Le non débat :

Evidemment les parents et habitants étaient fâchés et l’ont dit, même criés, puis sont partis progressivement vu l’impossibilité d’une discussion.

Mais si les parents inscrivent leurs enfants dans le privé, c’est parce qu’ils le veulent bien, il y a des places en collège, à R. Rolland comme à Casanova et même à Chérioux ; d’ailleurs le département vient d’investir 8.500.000 € à R. Rolland.

La présidente de l’association de quartier réalise une intervention musclée sur l’absence totale de concertation sur ce sujet comme sur tous. Le Maire dit que si le conseil de quartier ne fonctionne pas conformément à la charte il convient de venir le voir !

Un entrepreneur connu du monde artistique, s’inquiétant de la date de son expropriation, s’est venu répondre (par le maire adjoint et non par le DG de l’EPFIF) : venez nous voir (et certainement pas dans l’autre sens).

A la demande de production des écrits actant les solutions annoncées, quelques bafouillements puis le DG EPA a évoqué la seule procédure conjointe EPFIF/Département. (A quand la séance du conseil municipal pour l’achat des terrains ? Ou est-ce une délibération ancienne qui le permet ?). Mais chacun peut consulter le permis de construire du collège en allant en mairie et en demandant (poliment ?). Comme le permis est délivré, il doit y avoir toutes les conditions dedans !

Et les terrains à l’abandon, les décharges sauvages, la circulation excessive de poids lourds et livraisons, l’état des routes, les nuisances sonores, DHL et les bennes à déchets, …… : ne craignez rien, on s’en occupe ! D’ailleurs le Maire a rencontré le 1er Ministre à ces sujets, entre autres !

 

Jean-Claude Pierre

Urbaniste,

Ancien directeur de l’aménagement et du service technique de la ville de Vitry,

Habitant du quartier du Port à l’Anglais

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *