Le projet de collège au Port-à-l’Anglais ne doit pas se faire sans les habitants

collegeZACseinegare[1]Dans le contexte actuel, où nous prenons conscience des dangers qui menacent notre société (catastrophes écologiques, industrielles, sanitaires)[1] entraînant méfiance et doutes, il est temps et nécessaire d’inventer des formes nouvelles de démocratie, une formulation collective des réponses. C’est par exemple le cas avec le projet de construction d’un collège au Port-à-l’Anglais.

Ce 1er décembre 2016, la ville de Vitry, le Conseil départemental du Val de Marne et l’EPA ORSA organisaient une réunion d’information à ce sujet.

Un bref rappel des faits :

Le projet de construction d’un collège au Port-à-l’Anglais date de plus de 10 ans. D’abord annoncé dans un bâtiment ancien (papeterie Sybille) sur l’emprise Siacky, le projet a ensuite été transféré en bord de voie ferrée pour se retrouver au milieu de la ZAC Seine Gare Vitry. En décembre 2014, le conseil départemental a choisi le cabinet d’architecte Riccioti, prévoyant une livraison du collège pour la rentrée 2017/2018. Quelques mois après, en février 2015, la Fabrique Vitry en mieux avait pris l’initiative d’organiser une présentation du collège, avec les plans qu’elle avait pu se procurer auprès du département.

Puis on a appris fortuitement, au début de l’année, que le sous-sol du terrain finalement choisi était lourdement pollué aux hydrocarbures, entraînant un surcoût de 8 millions d’euros. Interrogée en mars 2016 lors d’une réunion publique à ce sujet, Mme Rabardel, 1ere vice-présidente du conseil départemental et conseillère municipale de Vitry, s’était engagée à organiser une réunion d’information avec la population au mois de juin de cette année. En conseil de quartier, des habitants avaient sollicité les élus pour que ce projet fasse l’objet d’un débat. Outre un débat en juillet en conseil municipal de Vitry, il fallut attendre le 1er décembre pour que les trois instances susnommées proposent un temps d’échange avec les habitants.

Un format de réunion peu apprécié

La réunion s‘est ouverte par les traditionnelles prises de paroles des élus à la tribune  d’abord M. le Maire, puis M. Leprêtre, suivi de Mme Rabardel. La petite centaine de participants (parmi lesquels l’on pouvait trouver une vingtaine d’élus et de salariés de la ville et du département) apprend alors que le groupe scolaire sera construit sur le terrain adjacent au collège en lieu et place de l’hôtel d’entreprise (dont la construction devait être lancée en 2016/2017 et qui n’apparaît désormais plus dans le projet de ZAC), que la date d’ouverture est repoussée de deux ans, soit à la rentrée 2019, et que les différents acteurs décideurs (ville, département, epa orsa) travaillent en bonne intelligence à trouver les meilleures solutions.

C’est ensuite au tour du cabinet d’architecte et aux services techniques du département et de l’entreprise de construction d’intervenir. En tout une heure de présentation tandis que les habitants piaffent d’impatience de donner leur avis et de poser leurs questions. Ils n’en peuvent plus ! Certains coupent la parole aux intervenants, d’autres font des boutades, d’autres se plaignent…les élus demandent aux derniers intervenants d’aller plus vite. Arrive enfin le moment des échanges.

Des questions bien légitimes mais malheureusement trop tardives

Plusieurs habitants s’expriment, les critiques et les questions fusent. L’un dit que la présentation des plans et des caractéristiques techniques était superflue, la presse locale et municipale l’ayant déjà fait. D’autres expliquent que le retard de l’ouverture de ce collège contraint des parents à inscrire leurs enfants dans l’enseignement privé et que l’agrandissement du collège Romain Rolland ne satisfait pas. Un autre encore s’inquiète du problème de pollution, avec une nappe d’hydrocarbure mouvante, aucune garantie étant apportée sur qui va payer la dépollution. Et une habitante de rétorquer que la manière dont a été gérée la construction du collège d’Ivry Confluences (dont la pollution au mercure détectée après la construction empêche son ouverture !) rend la confiance des habitants très fragile.

Les élus répondent, peu d’habitants semblent satisfaits. L’ambiance est  électrique.

Mon avis

L’avis que je voulais donner étant autant celui du représentant élu au conseil municipal que celui de l’habitant. C’est celui partagé par les membres de mon groupe, Vitry en mieux, qui dit depuis plusieurs années que des décisions pour des projets à l’échelle de la ville, ne peuvent pas être seulement prises en petit comité par quelques décideurs. Les habitants et futurs usagers sont malheureusement tenus au courant des informations en dernier lieu, alors qu’ils devraient être l’acteur indispensable dans l’élaboration en amont du projet. Je suis convaincu que si les habitants avaient pu participer aux décisions en ce qui concerne le choix du terrain et sa localisation, nous n’aurions sûrement pas eu les problèmes que nous rencontrons aujourd’hui ; à savoir un surcoût lié à la pollution, un report de l’ouverture du collège, le report des élèves dans le privé, et le mécontentement de la population.

Mon départ précipité :

La goutte d’eau qui a fait déborder le vase a lieu quand un élu de sa tribune donne des leçons de bonne tenue à une habitante qui demande des précisions. « En tant qu’enseignante madame vous devriez savoir qu’on ne coupe pas la parole. » Il n’y a qu’un élu ayant une trop haute estime de lui qui peut s’en prendre à une habitante de cette manière. Les élus ne sont pas des professeurs et les habitants des élèves devant rester respectueux et attentifs, à l’écoute de la bonne parole de l’élu ! Cette vision n’est pas la mienne et je la trouve insultante.

Cette manière de faire de la politique qui tend à prendre des décisions dans le dos des citoyens, de considérer les élus au-dessus des habitants est détestable et m’a profondément indignée hier soir au point de préférer quitter la salle.

De nombreuses expériences existent à travers le monde, dont nous ferions bien de nous inspirer. Comme l’analysent Elisa Lewis et Romain Slitine « la complexité du monde fait que les citoyens ne peuvent plus se reposer sur les seuls élus et les pouvoirs publics pour prendre en charge tout ce qui relève du bien commun. »

 

Frédéric Bourdon.

Conseiller municipal / Président du groupe Vitry en mieux

 

 

[1] le sociologue Ulrich Beck parle d’une « société du risque »

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